Mon expérience de voyage en autocar/bus

aymara chapeau melonJ’ai certainement fait la rencontre la plus insolite de ma vie dans un bus péruvien reliant de nuit la ville de montagne qu’est Puno (sur le lac Titicaca) à l’ancienne capitale de l’empire inca, Cuzco. J’étais arrivée très tôt pour m’abriter du froid qui commençait à tomber sur la ville, le soleil se couchant. Une fois mon billet acheté, je m’abritai donc dans les locaux de la compagnie de bus et pris place sur le seul banc du local, histoire de reposer mon dos de l’énorme sac à dos que je portais. Des voyageurs boliviens arrivaient et s’installaient sur le banc, à côté de moi, une fois leurs billets achetés. Le banc se remplit très vite, et bientôt la queue se fait debout. Quarante cinq minutes avant le départ, arrive une vieille indienne aymayra au chapeau melon typique. Elle porte un balluchon sur son dos, qui semble bien lourd. Malgré le froid, elle transpire à grosses gouttes en le posant. Son visage est strié de grosses rides épaisses dues au soleil et à la vieillesse. Pourtant personne ne se lève pour lui laisser sa place ; ce n’est malheureusement qu’une indienne aux yeux de beaucoup de péruviens, elle est transparente. Je me lève pour lui céder ma place ; étonnée, elle refuse poliment. Mais j’insiste tant et si bien qu’elle finit par s’asseoir. Dix minutes avant le départ, nous montons dans le bus les uns après les autres, et le hasard fait que ma vieille mamie aymayra a la place à côté de moi. Elle s’assied avec toutes ses jupes superposées, me sourit. Une fois le bus parti, j’ose lui poser des questions sur sa vie, pourquoi toutes ses jupes, comment lutte-t-elle contre le froid si sec en ayant des sandales sans chaussettes et des jupes qui arrivent au genou… des questions d’étrangère qui ne comprend pas ce qu’elle voit mais qui la font sourire. Un souvenir qui n’aurait jamais existé sans un voyage de nuit en bus et un peu de savoir-vivre !

Pour être honnête, j’ai également vécu une belle frayeur en bus. En 2005, je vivais en Colombie. Lors d’un voyage de 16h entre Bogota et Ipiales pour me rendre en Equateur, une partie du trajet s’est fait de nuit, sur des routes où beaucoup de bus se font au mieux racketter, au pire attaquer par des groupes armés illégaux (FARC et paramilitaires). Je n’étais pas très rassurée, mais j’avais déjà fait Medellin-Bogota de nuit, rien ne s’était passé alors que des glissements de terrain avaient bloqué les routes, favorisant en temps normal les attaques des véhicules et personnes arrêtées sur le bord de la route. Au milieu de la nuit, le bus s’est arrêté une 1ère fois pour crevaison, puis une 2nde fois pour le même motif sans qu’aucun accroc n’intervienne. Malheureusement la 3ième fois fut la bonne : des hommes armés barraient la route. Je ne savais pas si ces hommes étaient des militaires du gouvernement faisant une patrouille ou des membres d’un groupe armé illégal (paramilitaire, groupe d’auto-défense, guérilléros). Nous dormions tous plus ou moins ; moi, moins que les autres, d’un œil. Terrorisée, je ne pensais qu’à une chose, cacher mes yeux bleus qui plus que tout m’identifiait comme une étrangère. Les bottes de l’homme armé me semblaient résonner dans le bus. Je savais qu’il était à côté de moi, je sentais le courant d’air que son corps brassait en avançant, puis une nouvelle fois en repartant, aussi lentement et tranquillement qu’à l’aller. Et finalement, un coup de flip pour rien… et une histoire à raconter !